Le mois de... Sire Cédric répond à nos questions (Partie 1)

Licorne :

Bonjour les filles, bonjour Sire Cedric,

Bien, je finis ce dernier roman et je suis encore scotchée par ce récit, waow ! Décapant, palpitant, intrigant ... Tout ce que j'aime dans un thriller, cette maîtrise du suspens est absolument remarquable, presque impossible de lâcher le livre...

Comment avez vous vécu l'écriture de ce roman ? Le suspens et la tension sont tels et paraissent "si naturels' que je voulais savoir si vous vous laissiez emporter par votre inspiration en écrivant des scènes d'actions par ex. ou si vous respectiez au contraire un scénario très minutieux.

Ma chronique est actuellement en écriture, mais je voulais déjà vous dire combien j'ai aimé les personnages qui sont assez "ordinaires" par rapport à vos héros récurrents. Est ce délibéré d'avoir choisi ici des "monsieur et madame tout le monde"? Ils ont même un petit côté "looser et paumé" au fond qui les rend attachants et proche de nous au fond.

Merci d'avance de prendre le temps de répondre à mes questions.
A présent, je me demande bien ce que je vais pouvoir lire après avoir pris une claque pareille ! Tout va me sembler fadasse !

Sire Cédric :

Merci Licorne et bonsoir tout le monde !

Je suis sincèrement ravi que tu aies été « scotchée » à ce point par mon histoire :-) Mon but quand j'écris est que le lecteur ne décroche pas jusqu'à la dernière ligne. Je veux qu'il soit en permanence impatient de tourner les pages du livre pour découvrir la suite !

Le côté « naturel » de l'intrigue et du suspense permanent est quelque chose qui me passionne. C'est vraiment un but que je me fixe. Écrire un livre est un travail complexe où l'on invente une histoire de A à Z, mais il faut qu'au final le lecteur ne voie rien de tout ce travail, qu'il ait simplement l'impression de vivre l'histoire en direct avec les personnages, d'entendre leur pouls battre plus vite et d'avoir peur pour eux !

Pour écrire Avec tes yeux, j'avais préparé un plan assez précis de ce que je voulais raconter, mais ce plan me laissait une belle marge de manœuvre pour se dessiner au gré des chapitres. Disons que je savais parfaitement où j'allais, mais pas forcément toujours comment j'allais y arriver. C'est ma manière de travailler en règle générale. J'ai beaucoup de mal à me lancer tant que je ne « voie » pas la scène, tant que je ne la « sens » pas comme quelque chose de réel. Quand j'y arrive, alors je fonce ! Je me mets à écrire en m'impliquant dans l'histoire que je raconte. Je fais cela, car je tiens à avoir le meilleur angle possible, le plus naturel, le plus proche de la perception des personnages. Et aussi, je recherche toujours à frôler, de manière palpable, une sensation de déséquilibre permanent vers l'avant : ainsi, même en arrêtant de bouger, on sent que l'on bascule, qu'on va plonger un peu plus et qu'il est impossible de s'arrêter, encore moins de faire machine arrière. Si j'arrive à garder cette sensation de vertige tout au long du livre, je sais que le lecteur ne décrochera pas, car il sera lui aussi emporté par l'histoire ! 

Pourtant, je tiens à préciser que ce roman n'est pas une histoire d'action (comme l'était La mort en tête par exemple) même si on y retrouve une ou deux scènes de poursuite. Je voulais revenir à un roman d'angoisse dense, à l'image du célèbre Psychose de Robert Bloch (et du film mythique qu'en a tiré Alfred Hitchcock) et pouvoir proposer une aventure vraiment différente – et vraiment effrayante !

D'ailleurs, puisque tu poses la question des personnages, j'ai en effet mis en scène des personnes ordinaires, réels, dans ce nouveau roman. Je suis très attaché à Eva et Alexandre, mais ils sont de vrais superhéros, capables de traverser des situations impossibles – presque – sans une égratignure. Je voulais écrire un roman différent cette fois. Les personnages qu'on rencontre dans Avec tes yeux sont tous des gens ordinaires : une jeune femme de vingt-six ans qui manque cruellement de confiance en elle, un trentenaire que la petite maie vient de quitter et dont la vie est dans le creux de la vague... Je tenais à ce que les lecteurs puissent se reconnaître en eux, ou au moins puissent les aimer et s'y attacher.

Marie juliet :

Bienvenue sire Cédric!

Comme Licorne j'ai dévoré Avec tes yeux!

Je m'interroge également sur les personnage et notamment sur ceux des enquêteurs :
Pour la gendarme Nathalie : Pourquoi avoir choisit un personnage aussi "cassé" ?
Si je me rappelle bien, Vauvert également avait un sacré passif (mais là ma lecture remonte).

Sire Cédric : 

Chère Mariejuliet,

Le personnage de Nathalie est celui qui, objectivement, évolue le plus dans ce roman. Je voulais un personnage qui semble très faible – et qui l'est, en tout cas au début – mais qui dépasse ses peurs et soit capable de « grandir » au fil de l'histoire. Je ne pense pas qu'elle soit si « cassée » que ça. Elle a simplement des problèmes personnels, qui sont évidents, pas simples, mais dont elle seule peut se débarrasser... si elle le décide. Je pense que nous sommes tous comme elle, à un niveau ou à un autre. Nous avons chacun nos faiblesses, nos fantômes, des personnes qui nous font du mal alors qu'elles nous aiment... Et nous sommes obligés de grandir pour ne pas se laisser dévorer par ces problèmes.

Quand j'invente une histoire, j'aime trouver des personnages qui ont un parcours initiatique à effectuer. Et en ce sens, tous les personnages d'Avec tes yeux sont à un stade clé de leur existence. Ce qui leur arrive n'est pas anodin, pour aucun d'entre eux, et chacun effectue un vrai parcours au fil du livre.

AuroreBouquine : (moi)

Avant de lire vos romans, je ne connaissais pas la particularité génétique qu'est l'albinisme. J'ai dû effectuer des recherches pour voir à quoi pouvais ressembler le personnage d'Eva et j'ai trouvé que c'était original car je n'ai jamais vu ce sujet dans d'autres romans. Je me demandais donc pourquoi avoir choisis cette particularité pour incarner le personnage d'Eva ?

Sire Cédric : 

Bonsoir chère Aurorebouquine !

Il me semble que les albinos dans la littérature (surtout policière) sont assez nombreux, au contraire ! Du Da Vinci Code à l'Auberge de la Jamaïque, on les croise très souvent.

Mais en ce qui concerne mon histoire personnelle, je dois avouer qu'une série d'aventures de fantasy a particulièrement marqué mon adolescence : il s'agit des aventures d'Elric de Melniboné, sous la plume de Michael Moorcock. Ce prince albinos aux yeux rubis et au destin mythique est resté gravé dans mon imagination comme l'archétype ultime. Depuis cette époque, dès que je pense à la manifestation de la magie dans la chair humaine, j'imagine aussitôt une dépigmentation des cheveux ! Un peu comme dans les films également, que ce soit Les griffes du cauchemar ou bien encore Poltergeist, pour ne citer que les premiers qui me viennent à l'esprit, et où les personnages reviennent de l'autre monde avec des mèches de cheveux ayant instantanément blanchi.

C'est pour cela que j'ai choisi un personnage albinos, mais aussi que mes démons ont les cheveux blancs. À cause de cette vieille obsession liée à Elric. Le physique d'Eva est différent sans l'être vraiment. Juste assez pour qu'elle se sente étrangère, quelle que soit la situation. Car, c'est bien connu, tout le monde juge tout le monde, tout le temps ! Mais c'est aussi l'incarnation de sa différence quasi surnaturelle par rapport au commun des mortels, ce petit « plus » invisible en elle, qui prend une manifestation visible dans la couleur de ses yeux.

Petite intervention off de Sire Cédric :
Chers amis, désolé pour ce petit retard dans mes réponses ! Je navigue entre Toulouse et Paris, ces jours-ci !

Dup :

Bien le bonsoir Sire Cédric.

Tu dis à Licorne " cette fois ci je voulais des personnages ordinaires"... Est-ce à dire que nous aurons le plaisir de retrouver Alexandre bientôt ? 

Une Dup en manque ! :)

Sire Cédric :

Chère Dup, ne t'en fais pas, Alexandre et Eva ont encore des aventures – plus que mouvementées, et plus exubérantes encore – à vivre, et je compte bien les raconter en détail ! Mais je n'ai pas envie de m'enfermer dans une unique série non plus. Au fond de mon crâne, là où il se passe parfois de drôles de choses, trop de nouveaux personnages m'appellent avec des voix insistantes :-)

Violaine :

Bonjour Sire Cédric,
Je suis une nouvelle "victime" de vos livres...je ne vous connaissais pas du tout jusqu'à ce "Mois de". Enfin j'avais bien vu vos publications par l'intermédiaire de certaines fans sur Facebook (Loley pour ne pas la citer) mais je n'avais jamais lu vos ouvrages.
Et je dois dire que pour le côté stressant et angoissant, vous êtes au top !!! 
Je suis de nature un peu trouillarde donc j'appréhendais la lecture (tout le monde me disait que j'allais avoir peur) mais j'ai lu votre livre en 2 jours...

J'ai été tentée au début d'arrêter la lecture car c'était flippant mais l'envie de savoir a été plus forte et c'est peut-être là votre talent...savoir retenir le lecteur alors que vous écrivez sur la noirceur de l'Homme !!

Bref, j'ai finalement bien aimé cette lecture et elle m'a aussi posée question : comment arrivez-vous à écrire cela sans avoir peur vous-même ? On vous l'a peut-être souvent demandé mais comment trouvez-vous l'inspiration, par quel biais (médias, faits divers) ?

A un moment donné j'ai pensé que Thomas allait se réveiller de ce cauchemar car je me suis dit que c'était trop pour un seul homme mais peut-être est-ce un "défouloir" pour vous d'écrire et d'aller jusqu'au bout de la résistance humaine ?

Sire Cédric :

Chère Violaine, bonsoir, et merci beaucoup pour ces compliments ! Que le lecteur trouve l'histoire angoissante sans pouvoir s'en détacher est justement mon but et mon plus grand plaisir !
Qu'est-ce que je ressens moi-même quand j'écris des histoires aussi tordues ? Eh bien, des tas d'émotions très différentes ! Mais, avant tout, je dois avouer que j'aime, j'adore inventer des horreurs. Depuis que je suis enfant et que je regardais la pleine lune depuis la fenêtre de ma chambre, en me demandant si au même moment, quelque part, des gens étaient en train de se rouler par terre pour se transformer en loups ! Je raffole de ces histoires, sincèrement. Elles font partie de nous. Leur but n'est pas de susciter le dégoût, bien au contraire. C'est l'excitation de l'imagination, et le fait qu'on soit impliqué émotionnellement qui les rendent si savoureuses.

Je suis resté cet enfant qui regarde le monde autour de lui et s'invente, à partir de ce qu'il voit, des histoires hautes en couleurs pour se divertir. Et pour divertir les autres. Il n'y a pas d'autre prétention derrière ce que je fais. Et les sources d'inspiration, je les ai toujours devant les yeux. Les histoires ne parlent toujours que d'une chose : de l'être humain. Et c'est encore plus vrai pour les histoires horrifiques ! Est-ce un défouloir ? Oui, très certainement ! L'envie de faire oublier au lecteur ses problèmes quotidiens, de lui donner un sourire en coin de connivence, car après tout rien de tout cela n'est vrai. Mais pas seulement ça. Les histoires sont aussi des métaphores de nos vies, de nos interrogations existentielles les plus profondes. Je pense que si nous aimons tous à ce point les histoires de mystère, même les plus sinistres – ou surtout les plus sinistres ! –, c'est parce qu'au fond, elles nous rassurent. On en revient toujours plus sereins. Et quoi de plus logique ? Après tout, elles démontrent le plus souvent que, quelles que soient les difficultés dans lesquelles nous sommes plongés, on peut les affronter et grandir !

Nouvelle intervention off de Sire Cédric :
Chers amis, désolé, à nouveau, pour le petit délai de réponse !
Pour tout vous dire, je me trouve de nouveau dans le train, retour à Toulouse cette fois, après une journée intensive de promo à Paris riche en rencontres. Demain matin, c'est la sortie de mon nouveau roman, je suis déjà sur les starting-blocks ! Et c'est une bien longue journée qui se profile, car elle débutera par deux rencontres successives avec des classes de seconde dans un lycée, se poursuivra à la librairie La Renaissance où j'irai signer les livres commandés par correspondance sur leur site, et se finira par une rencontre avec les lecteurs à la médiathèque de Seysses, à côté de Toulouse...
... Mais revenons aux questions qui vous intéressent !

Marion :

Bonjour, 
Tout d'abord merci pour vos romans qui sont de véritables pépites ! 
Je voulais savoir si parmi vos livres publiés, il y en a un en particulier que vous souhaiteriez réécrire, ou êtes vous satisfait de votre travail ?

Sire Cédric :

Merci beaucoup Marion ! Je travaille très dur pour que chaque livre soit unique, divertissant, et qu'il laisse une marque dans les souvenirs du lecteur. C'est vraiment important pour moi.
De ce fait, je suis fier de chacune de ces histoires, depuis les plus anciennes réunies dans mes recueils « de jeunesse ». Quand je rends un manuscrit, il est toujours le meilleur de ce que je suis capable de faire, en tout cas à ce moment-là. Jamais je ne publierai un livre dont je ne suis pas totalement fier et sans regrets. Chacun d'entre eux marque une période de ma vie.
Avec le recul, forcément, je constate l'étendue de ma propre évolution. Chacun de mes livres a été meilleur que le précédent, et cela à tous les niveaux. J'écris cent fois mieux aujourd'hui qu'il y a dix ans ! Mais pour autant, aimerais-je en réécrire un ? Absolument pas. Sincèrement. Chacun de ces livres est ce qu'il doit être. Pas plus, pas moins. Il y a une scène ou deux que je ne referais pas de la même manière, aujourd'hui, c'est certain. Mais dans l'ensemble, je ne changerais rien à ces romans.

Librairie Du Bonheur : 

Bonjour, 
Aujourd'hui deux petites questions me viennent : 
- Vous arrive-t-il de perdre la limite entre la fiction et la réalité quand vous écrivez ?
- Si vous deviez adapter l'un de vos romans en film, lequel choisiriez-vous ? :-)

Merci pour votre précédente réponse !!

Sire Cédric :

Perdre la limite entre fiction et réalité ? Ah, ça non, jamais !
Écrire n'est qu'un jeu. Lire un divertissement. Il est riche en émotions, et quand il est bien fait, le reflet de notre imagination et de nos questions existentielles. Mais c'est tout. Les histoires des livres n'existent pas. Et c'est justement ce qui les rend savoureuses, car on peut frissonner et aller dans l'horreur pure, au fond nous savons qu'il ne s'agit que d'une invention !
Quant à savoir, si j'avais ce choix, quel livre j'aimerais voir transposé sur grand écran... je pense que cela me réjouirait de voir De fièvre et de sang ! Je me demande bien comment serait imaginée Eva... ou Alexandre Vauvert ! Et qui sait... cela arrivera peut-être...

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